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28 août 2022

Incendies en Gironde

Sud-Ouest du 27 août 2022

2022 08 27 SO Incendies en Gironde la lutte jusqu'au bout

Sud-Ouest du 27 août 2022 

Sur le front des incendies, le combat sans fin des pompiers 

En première ligne face aux violents incendies de l’été, les pompiers continuent leur travail de sape pour éteindre un feu rampant, maîtrisé mais toujours menaçant. Reportage à Hostens (Gironde)

2022 08 27 sur le front2

Incliné de 30 °C vers l’avant, le sergent-chef Anthony Cavillier forme une figure géométrique précaire. Son équilibre repose sur la puissance de l’eau qu’il propulse sur une terre sableuse noire et grise, morte. Il la retourne, se fraie un chemin sous cette couche sur laquelle l’incendie Landiras 2, qui a connu son apogée la nuit du 9 au 10 août, est passé à 5 km/ heure, avalant 5 000 hectares avant le point du jour (1). La vitesse à laquelle les promeneurs profitaient de ces pinèdes derrière le quartier du Frayot à Hostens, avant que le feu n’y laisse une empreinte qui prend encore aujourd’hui le nez, la gorge, et serre la poitrine. 

S’il semble avoir tout mangé, laissant des arbres cramoisis, le feu continue son oeuvre. La terre fumante par endroits trahit sa respiration. Il couve dans la tourbe, quelques centimètres sous la surface, consume ces sous-couches riches en combustible, se crée des galeries et ressort quand un peu d’air le pousse ou qu’un peu de vert l’appelle. 

Alors pour le débusquer, Anthony le pompier fait gicler la terre brûlante qui vient lui chauffer les bras et le cou, soulève la poussière qui lui saute au visage, pique les yeux, marque sa face de noir et l’empêche de respirer. 

Usant moralement 

Il pause la lance et rejoint Thomas, Mélanie et Simon, son équipe, à l’arrière du camion. Il se brumise le visage, se masse l’épaule. « C’est un travail de fourmi mais il faut le faire, sinon le feu va reprendre », assène, marqué du sceau du devoir, le pompier arrivé de la Vienne. Depuis dimanche 14 août sur le feu Landiras 2, bien avant sur le premier, les pompiers s’échinent contre un ennemi peu visible, font des rondes dans la forêt et attaquent les fumerons. À la lance et à la pioche ou au râteau à remblais pour atteindre ces zones qui se consument à plus de 100 °C. 

Sur plusieurs mètres carrés, la terre est retournée, les racines des pins calcinés sont à nu. Une fois la citerne vide, le quatuor viennois ira la remplir, pour la vider à nouveau. De 8heures à 19 heures, sans jamais se quitter – « on dort même ensemble », rigole Thomas, le conducteur, pompier depuis seulement deux mois. Une citerne de 3 000 litres n’est parfois pas suffisante pour noyer un gros fumeron. Ce feu zombie est usant moralement, professionnellement moins motivant. 

« On a l’impression de ne pas servir à grand-chose vu l’ampleur du chantier », confie Jules, pompier médocain au regard bleu perçant, en marge d’un briefing à quelques centaines de mètres des Viennois. « C’est un énorme périmètre sur lequel il faut effectuer un travail de besogne, laborieux. On n’a jamais été confronté à une situation aussi importante, complexe et longue », confirme le commandant des opérations de secours Salem Maizi, aux commandes ce mercredi 24 août. Reconnaissable sur le terrain avec son gilet jaune fluo, il tend constamment une oreille vers son talkie-walkie. «On traite environ une centaine de points chauds par jour, avec encore plus de 300 pompiers engagés », expliquait-il ce jour-là. 

« Dans l’histoire des feux » Le défi pour le commandement se trouve désormais dans la gestion des effectifs, après l’émulation de l’arrivée des pompiers européens et des renforts de toute la France. Jusqu’à 2000 personnes ont été basées au domaine d’Hostens, cœur du réacteur face aux incendies. Il ne sera pas déserté tout de suite : le feu n’est toujours pas éteint. «On dépend des conditions météo », explique Salem Maizi. Si l’horizon semble enfin s’éclaircir sur le secteur du premier feu, la préfecture autorisant à nouveau l’accès au massif forestier dans plusieurs communes depuis vendredi, il aura fallu attendre un mois après le passage des flammes. 

Le « Landiras 2 » n’est considéré maîtrisé que depuis jeudi 25 août, avec un dispositif désormais diminué la nuit. Alors sur le camp, l’ambiance continue d’être entretenue. « Ils mangent bien, ils dorment bien », espère le commandant Salem Maizi. 

C’est à table que s’échangent les expériences et que quelques bières descendent. Un groupe regarde le téléphone d’un pompier. « Là on était encerclés par les flammes. Le chef de secteur disait qu’il n’avait jamais vu un feu aussi violent ». 

L’incendie monumental avec ces fronts de flammes, tous ceux qui l’ont vu s’en souviendront. « C’est pour ça qu’on vient là », confirme sur le terrain Thomas, le pompier viennois, qui s’occupe d’ouvrir les vannes et de gérer le niveau d’eau. « Malheureusement, il sera écrit dans l’histoire des feux ». 

Plus de 20 000 hectares en deux fois, en juillet (2) et en août, près d’une dizaine de maisons brûlées, mais aucune victime. « Le but, c’était zéro maison, mais le feu a été plus fort que nous », regrette Thomas. Il enlève son casque, regarde autour de lui. « C’est lunaire, mais hier on était sur un chantier où ça avait déjà un peu repoussé. Ça fait plaisir de voir la nature qui reprend ses droits, je serais curieux de revenir voir dans quelques jours. » 

(1) Landiras 2 a ravagé 7 400 hectares entre le 9 et le 14 août. 

(2) En juillet, près de 14 000 hectares avaient brûlé dans ce secteur du Sud-Gironde et à la Teste-de-Buch.

2022 08 27 SO La forêt ne pourra pas résister aux feux de l'été et aux tempêtes de l'hiver

2022 08 27 SO La forêt ne pourra pas résister aux feux de l'été et aux tempêtes de l'hiver2

2022 08 27 SO La forêt ne pourra pas résister aux feux de l'été et aux tempêtes de l'hiver3

2022 08 27 SO Un cellule psychologique pour verbaliser le traumatisme

 

2022 08 27 SO Un cellule psychologique pour verbaliser le traumatisme2

2022 08 27 SO Un cellule psychologique pour verbaliser le traumatisme3

2022 08 27 SO La Teste-de-Buch Le feu est éteint la vigilance perdure

2022 08 27 SO La Teste-de-Buch Le feu est éteint la vigilance perdure2

2022 08 27 SO La dune du Pilat frontière entre deux mondes

 

Sud-Ouest du 27 août 2022 

Incendies à La Teste-de-Buch : La dune du Pilat, la frontière entre deux mondes 

Le long de l’océan, la dune du Pilat cloisonne deux mondes, celui ravagé de la forêt et des campings, et celui, estival, intact, joyeux et plein de bonheur, des plages

2022 08 27 Pilat

Elles sont désormais si loin les plages océanes. Depuis le terrible incendie, la route de Biscarrosse menant au Petit Nice, à la Lagune et à la Salie est fermée. Il y a celles du Bassin, bien sûr, mais comment retrouver le sauvage des plages océanes ? En bateau ou à pied, depuis le nord de la dune du Pilat. 

Mercredi midi, il y a presque plus de soleil que d’eau et de sable au pied de la Dune. Les nuages ont eu peur et sont partis. Les fabricants de Biafine peuvent d’ores et déjà doubler la production. Les gens se baignent toutes les deux secondes avec, dans un coin de leur tête quand ils sont dans l’eau, la vue sur la Dune, qu’il va bien falloir grimper pour rentrer, plus tard… 

« C’est le paradis » 

Le sud désert ressemble à une utopie. Au loin, la pointe du Petit Nice et ses falaises de sable se découpe dans le béton bleu du ciel. Joël, Sylvie et Patricia s’arrêtent avant. Ici, sous l’ombre des roseaux. À quelques centaines de mètres de la foule. « D’habitude, on va jusqu’au Petit Nice. » Et pourquoi pas aujourd’hui ? « Parce que d’habitude, on laisse une voiture à la Corniche et une au Petit Nice, pour le retour… » Il y a bien sept bornes jusque là-bas, alors l’aller-retour à pied… 

Et puis, eux ne veulent pas « voir la forêt brûlée ». Ça fait trop mal. D’ici, on ne voit rien. La montagne de sable cache tout. Elle est comme un mur qui sépare deux mondes, celui de la plage et de l’été, et celui, interdit, de la forêt et de l’incendie. 

Venir en bateau 

Blanche, Claire, Maxime, Alain et Isabelle viennent de mouiller au milieu de la Dune. Ils arrivent du Cap Ferret. « En général, on va dans le fond du Bassin, mais on avait envie de changer. Y a pas trop de houle, pas trop de vent, on voulait du sable, alors on s’est aventuré jusqu’ici. Et c’est le paradis ! Le grand bonheur ! Quand on regarde en face, à Arguin, on se dit qu’on est bien mieux là. » 

La passe sud ressemblerait presque à l’A10 le jour des départs en vacances tant il y a de bateaux. À moteur, évidemment. Le bruit ne perturbe pourtant pas deux goélands qui regardent les navires se rendre, les uns derrière les autres, les uns à côté des autres, vers Arguin pour retrouver tous ensemble la nature sauvage de la conche sud du banc. Ils stationnent en épis, comme au centre-ville un jour de marché. 

Eux ne veulent pas voir un bateau se pointer sur la plage. Stéphane et Véronique font partie des orphelins de la Lagune. Où bronzer nu sinon làbas ? Au Porge ou dans les Landes, mais c’est tellement loin. Personne ne parle. Ils ont enlevé leur maillot dans le sud de la Dune. « On cherche une plage où on ne gêne personne et où personne ne nous gêne. Ici, ça va. Malgré les moteurs des bateaux. Pourvu qu’un scooter des mers ne se pointe pas… » 

Un autre monde 

Un peu plus loin, quatre femmes et un homme sont assis sur des chaises de camping à l’ombre des roseaux et dans le vent d’ouest qui s’est levé. « La climatisation naturelle ! » Sur la table, il y a des flûtes remplies de champagne, des huîtres, une tarte à la tomate. Du vin aussi. 

« Avec le bateau, on va partout, mais ici, il y a l’ombre et la tranquillité. » Ils sont bien. Et seuls. « C’est presque une plage privée, c’est magnifique ! » sourit une maman en surveillant ses deux mômes. 

En plein été, ces plages sont bondées. Ce sont celles des campings de la Dune. Mais, il n’y a plus personne de l’autre côté de la Dune. C’est un autre monde, un monde interdit, même si de temps à autre, quelques touristes s’y aventurent. 

En haut, tout en haut, à l’extrémité sud de la Dune, en lisière du camping Le Panorama, on marche parmi des tiges de charbon. Le feu est allé jusque-là. Un vélo de gosse et une chaise de camping sont là depuis juillet. La toile du siège est cloutée de petits trous cerclés de noir, les braises qui ont volé. Le site sent encore la fumée.

2022 08 27 Pilat4

 La forêt interdite 

Voulez-vous savoir pourquoi la forêt est interdite ? Parce que les pins cramés peuvent tomber, mais aussi parce qu’à l’ombre de ceux qui sont encore debout, parfois, vous sentez sous vos pieds un sol qui n’est pas chaud, comme l’est celui du sable de la Dune en plein soleil, mais bouillant et plein de trous menaçants. 

C’est triste et désolant à pleurer vers l’est et toujours aussi sublime et beau vers l’ouest. 

Jean-Marie et Chantal ont posé leurs vélos à l’espace d’accueil de la Dune, et puis marché sur la crête jusqu’ici. Ils pique-niquent à l’ombre du seul pin encore vert ici. 

« On ne savait plus trop si c’était interdit ou pas. On ne regarde pas la forêt brûlée, juste le point de vue sur l’océan. Quand on a un cadre comme ça… On habite une belle région quand même, incendie ou pas. »

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