Sécheresse
Sud-Ouest du 30 avril 2022
Sud-Ouest du 29 avril 2022
Climat : le gouvernement anticipe les sécheresses de l’été par des mesures controversées
Face au risque de sécheresse cet été en France, les agences de l’eau pourront dépenser 100 millions d’euros supplémentaires pour aider les filières agricoles à s’adapter au changement climatique ou créer des retenues d’eau. Une solution que contestent plusieurs associations
Alors que plusieurs épisodes de sécheresse ont déjà été constatés en France cette année, l’État a annoncé des mesures pour anticiper les prochains ce vendredi 29 avril. Les agences de l’eau pourront dépenser 100 millions d’euros supplémentaires pour aider les filières agricoles à s’adapter au changement climatique ou créer des retenues d’eau, une mesure pourtant contestée.
« La recharge des nappes d’eau souterraines de cet hiver a été modeste » et « selon les prévisions de Météo-France, le scénario le plus probable pour le printemps est une période plus sèche et chaude que la normale », souligne un communiqué. Le gouvernement publiera après la fin mai « une carte de prévision du risque de sécheresse pour cet été ».
Des mesures contestées
La ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, le ministre de l’Agriculture, Julien Denormandie, et la ministre l’Industrie, Agnès Pannier-Runacher, ont réuni récemment « les préfets coordonnateurs des sept bassins hydrographiques métropolitains afin de les inviter à anticiper les mesures nécessaires à la préservation de la ressource en eau ». Les ministres ont aussi augmenté pour 2022 « de 100 millions d’euros le plafond de dépenses des agences de l’eau, ce qui permettra de lancer des actions supplémentaires », inciter aux économies d’eau, lutter contre les fuites dans les réseaux, réutiliser les eaux traitées usées ou encore pour « l’optimisation des retenues existantes ou à la création de nouvelles retenues » d’eau pour les besoins agricoles.
Cette dernière mesure est pourtant décriée. Ses opposants dénoncent le risque d’assèchement des nappes profondes autour de retenues d’eau surdimensionnées et destinées seulement à quelques agriculteurs. France Nature Environnement (FNE), qui représente près de 6 000 associations, a mis en garde le gouvernement contre la tentation de « résoudre les problèmes par l’irrigation intensive et la création de nouvelles retenues », des « propositions techniques simplistes ».
Ouest-France du 28 avril 2022
Météo. Pourquoi le risque d’une sécheresse cette année en France est de plus en plus important
Le mois d’avril qui est sur le point de s’achever confirme qu’une sécheresse pourrait bien advenir en France en 2022. Car ces dernières semaines n’ont pas permis de redresser une situation déjà problématique.
Le lit de la Loire à Ancenis (Loire-Atlantique) en mai 2020. | FRANCK DUBRAY / ARCHIVES OUEST-FRANCE
Il n’aura finalement pas été à la hauteur des espérances. Alors que les spécialistes espéraient qu’il allait être suffisamment humide pour endiguer un risque latent de sécheresse en France, le mois d’avril qui est sur le point de s’achever, n’aura finalement vu que peu de précipitations tomber sur le territoire français.
Important déficit pluviométrique en avril
Ainsi, comme l’indique sur Twitter Météo France, « ce mois d’avril sera plus sec que la normale ». Et l’institut météorologique d’estimer le déficit pluviométrique qui sera enregistré ce mois-ci à environ 20 %.
🌧️❌#Sécheresse
— Météo-France (@meteofrance) April 28, 2022
Ce mois d'avril sera plus sec que la normale, à l'échelle de la France.
📊Un déficit pluviométrique mensuel qui fait suite à une saison de recharge (nappes phréatiques, de septembre à mars) déjà déficitaire d'environ 20%.
Tendance similaire à 2019.
⬇️⬇️ https://t.co/txd3dgfyk3 pic.twitter.com/QKFQJVTuqm
Comme le précise Guillaume Séchet, journaliste spécialisé en météo, ce déficit de précipitations concerne surtout les Hauts-de-France, Auvergne Rhône-Alpes, le Languedoc et la région PACA.
☔ Les pluies d'avril 2022 ont été très hétérogènes (déficit national proche de 20%).
— Guillaume Séchet (@Meteovilles) April 28, 2022
🌧 Régions les + arrosées : Alsace, Lorraine, Franche-Comté, Corse
☀ Régions les + sèches : Hauts-de-France, Auvergne, ouest de Rhône-Alpes, Languedoc, PACA
via @GaetanHeymes / @meteofrance pic.twitter.com/8M7413KS82
En revanche, une partie du Grand Est a été légèrement plus arrosée que la normale en avril, sans que ce surplus de précipitations ne compense les déficits enregistrés dans la région les mois précédents.
🌧️❌#Sécheresse
— Météo-France (@meteofrance) April 28, 2022
Ce mois d'avril sera plus sec que la normale, à l'échelle de la France.
📊Un déficit pluviométrique mensuel qui fait suite à une saison de recharge (nappes phréatiques, de septembre à mars) déjà déficitaire d'environ 20%.
Tendance similaire à 2019.
⬇️⬇️ https://t.co/txd3dgfyk3 pic.twitter.com/QKFQJVTuqm
L’hiver a déjà été très sec
Car si le fait que ce mois d’avril 2022 ait été particulièrement sec inquiète tant, c’est parce que le début de l’année et la fin de l’année 2021 l’ont été tout autant.
Ainsi, comme le note sur Twitter Gaétan Heymes, prévisionniste à Météo France, « chacun des mois de janvier à avril (ont été) plus secs que la normale ».
Ce mois d'avril 2022 sera plus sec que la normale en France, les quelques pluies d'ici samedi seront insuffisantes. Déficit moyen prévu de 20%.
— Gaétan Heymes (@GaetanHeymes) April 28, 2022
Chacun des mois de janvier à avril plus secs que la normale, ça n'est que la 4ème fois depuis 1959 : précédents en 1976, 2011, 2019. pic.twitter.com/nrpLVUxjHS
Et, plus généralement, depuis la fin de l’été 2021, seul le mois de décembre a été excédentaire en matière de précipitations.
Des nappes phréatiques peu remplies
Conséquence de ce manque latent de pluie : les nappes phréatiques nichées dans le sous-sol français ont des niveaux plus faibles que la moyenne. Dans son point sur la situation au 1er avril, le Bureau de recherches géologiques et minières sonnait même l’alerte.
« La situation est particulièrement préoccupante sur les nappes entre Vendée, Périgord et Maine ainsi que sur les nappes de Provence et de la Côte d’Azur », notait ainsi l’organisme. Une situation que le mois d’avril n’aura donc pas permis de redresser.
Par ailleurs, comme le relayait sur Twitter François Jobard, météorologue à Météo France, les sols de certaines régions, notamment dans le Sud-Est, sont eux aussi anormalement secs pour la saison.
#sécheresse Au 18 avril, l'indice d'humidité des sols (SWI) de la région PACA atteint 0.50, une valeur qui correspond à la moyenne 1981-2010 d'une fin juin. Un niveau aussi bas n'a jamais été atteint "si tôt" (avant mai) dans la saison depuis au moins 1959 (début indicateur).1/2 pic.twitter.com/QetcwxbGpO
— Francois Jobard (@Francois_Jobard) April 19, 2022
Restrictions et vigilance
De fait, au 28 avril 2022, 11 départements français ont déjà émis des arrêtés restreignant certains usages de l’eau ou appellent les habitants à la vigilance.
Et de la vigilance, il en faudra, car Météo France a laissé entendre dès mars que le mois de mai pourrait lui aussi être chaud et sec.
Sud-Ouest du 2 avril 2022
« Ça devient alarmant » : la sécheresse menace déjà la côte méditerranéenne
Selon les dernières données météorologiques, la sécheresse frappe déjà dans le sud du pays, près de la côte méditerranéenne. Une situation qui correspond normalement à la période estivale. Des restrictions sur l’usage de l’eau sont déjà en vigueur par endroits, et le risque d’incendies déjà présent
À Toudon, près de Nice, seul un filet d’eau coule encore à la fontaine du village. L’alerte sécheresse a été déclenchée dans les Alpes-Maritimes et les prochains mois seront cruciaux, préviennent les météorologistes, refusant cependant tout catastrophisme dans une région Paca habituellement aride.
« C’est une des sécheresses hivernales les plus remarquables de ces soixante dernières années, mais ce n’est pas encore une situation de crise majeure », résume Philippe Gourbesville, hydrologue à l’université Côte d'Azur. En Provence-Alpes-Côte d'Azur (Paca), le déficit pluviométrique a atteint 30 % entre septembre et mars, période traditionnelle de recharge des nappes phréatiques.
L’épisode de sécheresse le plus important depuis 30 ans
Et le département des Alpes-Maritimes a été particulièrement touché, avec des précipitations en recul de 48 %, résultat notamment d’un mois de janvier « particulièrement compliqué avec seulement 4,2 mm de pluie », selon Simon Mittelberger, climatologue à Météo-France.
« Depuis 1959, il s’agit de la deuxième valeur la plus basse pour les Alpes-Maritimes après la saison 1989-1990 », précise Cécile Guyon, responsable des services climatiques et de la prévision de Météo-France sud-est. Le fleuve Var témoigne de ce phénomène, avec un débit de 10 m³ par seconde fin mars à la hauteur de Nice, « une situation qui correspond normalement à début juillet », souligne Philippe Gourbesville.w
Mais « la situation pourrait être complètement contrebalancée par des pluies en avril-mai. Ces deux mois seront décisifs », insiste Simon Mittelberger.
Déjà des restrictions sur l’eau
Mais « sur la bande littorale, il y a clairement une diminution des pluies », reconnaît cependant ce spécialiste. « Et quand on regarde les modèles climatiques, on voit que ce phénomène va s’accentuer, d’autant que les épisodes méditerranéens augmentent eux aussi, et sont de plus en plus violents, donc l’eau n’a pas le temps de s’infiltrer » dans les sols.
Sans attendre d’hypothétiques pluies en avril et mai, des restrictions ont déjà été annoncées jeudi par la préfecture des Alpes-Maritimes pour deux tiers des communes du département : remplissage des piscines interdit, comme le lavage des voitures ou l’arrosage entre 9 heures et 19 heures. De même, les fontaines et les jeux d’eau sont désormais fermés, la voirie ne peut plus être nettoyée à grande eau.
Les incendies inévitables ?
La situation est également suivie de près par les pompiers des Bouches-du-Rhône, qui estiment « à un mois et demi d’avance » l’état de sécheresse de la végétation, ce qui a déjà conduit « à des interventions significatives depuis quelques jours ».
« Mais on a bon espoir de faire la danse de la pluie » et d’avoir des résultats, tente de rassurer Vincent Pastor, du groupement risques naturels et feux de forêts. « C’est avril qui conditionnera la saison. » Pour Pierre Corbin, le maire de Toudon, le constat est là : « En 40 ans, je ne l’avais jamais vue avec un débit aussi faible notre fontaine », assure-t-il, « ça devient alarmant ».