Covid-19
Ouest-France du 6 avril 2022
Covid-19. Pourquoi le nombre de réinfections explose en France ? On vous aide à y voir plus clair
À ce jour, la proportion des cas possibles de réinfection représente 5,4 % de l’ensemble des cas confirmés en France. Cette nette augmentation des réinfections possibles au Covid-19 s’est notamment accentuée depuis l’arrivée d’Omicron. Comment l’expliquer ? « Ouest-France » vous répond.
Un écolier montre un test Covid-19 positif, le 17 mars 2022. Photo d'illustration. | DAMIEN MEYER / AFP
« J’ai eu le Covid-19 le 5 mars 2022, est-ce que je peux l’attraper une seconde fois aussitôt ? » Cette question nous est posée par Brigitte. Ouest-France vous répond.
Depuis décembre 2021 et la diffusion du variant Omicron en France, la fréquence des réinfections possibles par le Covid-19 a nettement augmenté. Si le risque de réinfection était déjà présent avant la vague Omicron de façon assez rare, les premiers cas de réinfection ayant été signalés dès la fin de l’été 2020, « on sait que pour certaines personnes la protection conférée par la maladie n’est pas parfaite, pas complète et donc on peut être malade une seconde fois avec des symptômes plus modestes que la première », explique Matthieu Revest, infectiologue au CHU de Rennes (Ille-et-Vilaine).
Après une courte stabilisation début janvier 2022, la proportion des cas possibles de réinfection rapportés à l’ensemble des cas Covid est de nouveau en hausse depuis la fin du mois de janvier et représente désormais 5,4 % de l’ensemble des cas confirmés, selon les dernières données disponibles publiées vendredi 1er avril par Santé publique France.
Les cas possibles de réinfection sont définis comme l’ensemble des personnes ayant présenté au moins deux tests positifs enregistrés dans la base de données effectués à 60 jours d’intervalle ou plus. Le délai entre les deux épisodes d’infection était de 242 jours en moyenne, a précisé l’agence de santé lors de son dernier point presse hebdomadaire.
Une réinfection au bout d’un mois, est-ce possible ?
Contacté, Yannick Simonin, virologiste et enseignant chercheur à l’université de Montpellier (Hérault), nous répond que « des études montrent notamment que chez les personnes infectées par le variant Omicron mais non-vaccinées, l’immunité apparaît faible contre les différents variants et qu’elle baisse assez rapidement au cours du temps ».
Le variant Omicron a tendance à induire des formes moins graves de la maladie mais d’avantage de réinfection. En pratique, « certaines personnes qui ont récemment contracté Omicron (le sous-variant BA.1 principalement) peuvent être réinfectées un à deux mois plus tard, notamment par le sous-variant BA.2, désormais majoritaire en France, poursuit le spécialiste des virus émergents. Si une réinfection au bout d’un mois n’est pas le plus probable, elle n’est donc pas impossible suivant notamment votre statut vaccinal et si vous avez été infectés initialement par le sous variant BA.1 ou BA.2. »
Comment expliquer ce phénomène de réinfection ?
En tout, 685 858 cas possibles de réinfection ont été identifiés entre le 2 mars 2021 et le 20 mars 2022, dont 95,2 % depuis le 6 décembre 2021, qui marque le début de la diffusion du variant Omicron en France, rapporte l’agence de santé dans son dernier communiqué hebdomadaire. « Il semble vraisemblable que l’atténuation de la réponse immunitaire post-infectieuse ou post-vaccinale au sein de la population française joue un rôle dans cette nette augmentation de la fréquence des cas possibles de réinfections, notamment chez les personnes n’ayant pas eu de dose de rappel du vaccin », indique Santé Publique France. Et d’ajouter qu’« il est également très probable que la très forte diffusion en France du variant Omicron, caractérisé par une transmissibilité accrue et un échappement immunitaire important, amplifie ce phénomène ».
88 % des cas possibles de réinfection pour lesquels un résultat de criblage était disponible et interprétable pour l’épisode de réinfection avaient d’ailleurs un résultat évocateur d’Omicron, selon les dernières données disponibles sur les réinfections possibles par le SARS-CoV-2 à partir de la base de données SI-DEP.
La reprise à la hausse de la circulation du coronavirus observée depuis plusieurs semaines en France et l’émergence du sous-lignage d’Omicron BA.2, majoritaire depuis fin février 2022, sont « deux facteurs pouvant jouer un rôle dans la tendance actuelle à l’augmentation du nombre de réinfections », selon Santé publique France.
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Une répartition des cas possibles de réinfection par région et par classe d’âge
Quid de la répartition régionale des cas possibles de réinfection détectés dans la base SI-DEP entre le 2 mars 2021 et le 20 mars 2022 ? « Des cas possibles de réinfection ont été détectés dans l’ensemble des régions françaises, avec des différences pouvant être importantes entre les régions en termes d’effectifs et de proportion des réinfections possibles parmi l’ensemble des cas confirmés de Covid-19 au cours de la période d’étude », précise l’agence de santé. Si en Bretagne on estime à 2,6 % la proportion des cas possibles de réinfection sur l’ensemble des cas confirmés, la région Provence-Alpes-Côte D’Azur atteint une proportion de 5,5 %.
Santé publique France note aussi une fréquence plus importante de réinfection chez les adultes âgés de 18 à 40 ans avec une proportion de 50 % des cas possibles que parmi l’ensemble des cas confirmés de COVID-19 détectés dans SI-DEP au cours de la période d’étude. À l’inverse, 1,5 % des cas possibles de réinfection sont âgés de 80 ans et plus.
La faute à Omicron ?
Plusieurs études récentes ont mis en évidence la possibilité de survenue d’une réinfection par le sous-variant d’Omicron, BA.2, après une infection par le sous-variant BA.1, y compris dans un délai très court (inférieur à 60 jours). Cependant, elles se rejoignent sur le fait qu’il s’agit vraisemblablement d’événements rares. En outre, la fréquence des réinfections avec un résultat évocateur d’Omicron lors des deux épisodes d’infections reste très minoritaire (moins de 1 % des cas), comme le montre le graphique ci-dessous.
« On estime que la réinfection avec Omicron est environ cinq fois plus élevée qu’avec d’autres variants, comme Delta par exemple. L’infection seule, sans vaccination, ne semble donc pas conférer une immunité suffisamment stable dans le temps pour éviter totalement les réinfections », détaille le virologiste Yannick Simonin.
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Les limites de l’étude
Attention toutefois, Santé Publique France reconnaît quelques limites dans cette étude à prendre en compte dans l’interprétation que nous en faisons. D’abord, « l’analyse de la base n’a pu être faite qu’à partir du 1er janvier 2021 (…) empêchant l’identification des réinfections survenues à partir du 1er janvier 2021 après un premier épisode de Covid-19 au cours de l’année 2020 ». Cela conduit donc à une sous-estimation de la fréquence des réinfections.
De la même manière, « le fait qu’il ne soit pas possible de recueillir d’information clinique (par exemple, absence de symptômes évocateurs de Covid-19 entre les deux épisodes), virologique (charge virale et séquençage) ou épidémiologique (notion d’exposition à risque précédant le test positif) dans SI-DEP limite cette analyse aux cas possibles de réinfection ».
Enfin, selon les critères retenus de cette analyse, il y a notamment celui de la réinfection prise en compte si elle intervient dans un délai minimal de 60 jours entre les deux épisodes de contamination. Toute réinfection qui pourrait survenir dans un délai inférieur n’est donc pas comptabilisée dans cette étude. « Néanmoins nous ne disposons pas, à ce stade, d’éléments indiquant que la survenue d’une réinfection par le SARS-CoV-2 moins de 60 jours après une primo-infection soit un phénomène fréquent, ni que le fait de ne pas les prendre en compte dans le cadre de cette analyse puisse avoir un impact notable sur l’interprétation que nous faisons de ces données en termes de fréquence ou de tendance », conclut l’agence de santé.
Ouest-France du 6 avril 2022
Covid-19. Ce que nous apprend l’expérience d’Israël sur l’efficacité d’une quatrième dose de vaccin
Après l’injection d’une quatrième dose de vaccin Pfizer contre le Covid-19, la protection contre la contamination se réduit, mais celle contre les formes graves reste stable, selon les données israéliennes. Voici ce que nous apprennent l’expérience israélienne et une étude qui en découle.
Un homme se fait vacciner à Tel Aviv en janvier 2022. | AFP
Quelle est l’efficacité réelle d’une quatrième dose de vaccin contre le Covid-19 ? Les premières réponses viennent une nouvelle fois d’Israël. Le 22 janvier, Israël a commencé à administrer une quatrième dose du vaccin BNT162b2 (le Comirnaty de Pfizer) à toute la population des plus de 60 ans. Les chercheurs du Weizmann Institute of Science ont analysé les données de santé de plus d’1,2 million de personnes. L’étude, publiée mercredi dans le New England Journal of Medicine, peut être lue comme un message déprimant ou rassurant, selon la façon dont on l’abord
Une protection contre l’infection qui diminue dès quatre semaines
La protection contre les formes symptomatiques semble diminuer de dose en dose (et de variant en variant), celle-ci disparaissant dès quatre semaines après l’injection. En France, une étude de la Drees, publiée le 1er avril, indiquait que cette protection disparaît trois mois après la troisième dose.
Cependant, et c’est une bonne nouvelle, la quatrième dose diminue bien le risque de forme sévère, comparé aux personnes n’ayant reçu qu’un seul rappel. Et cette protection n’avait pas diminué à la fin de la période d’étude (jusqu’au 2 mars). Ce qui reste bien l’essentiel et le but de ce rappel.
Une épidémie de syndromes de Covid long ?
Alors que la cinquième (sixième ?) vague va se retirer en France, ces résultats plaident pour une prochaine campagne de vaccination ciblée sur les seules personnes vulnérables.
Néanmoins, cette efficacité de plus en plus faible des vaccins disponibles (Pfizer comme Moderna) contre les formes symptomatiques laisse augurer une épidémie de syndromes de Covid long, qui ne touchent pas que les personnes atteintes de formes sévères.