Sarcomes
Sud-Ouest du 28 mars 2022
L’immunothérapie pour soigner les sarcomes
En pleine Semaine nationale du cancer, l’Institut Bergonié de Bordeaux a amorcé le déploiement d’un projet pour la prise en charge de patients atteints de sarcomes sévères. Le point
Le programme Condor pour la médecine de précision et l’immunothérapie des sarcomes a été présenté par le professeur Antoine Italiano de l’Institut Bergonié et Alban Bessede, directeur général d’Explicyte. THIERRY DAVID/« SUD OUEST »
Son nom est Condor comme l’oiseau. Un nom d’oiseau face à une mission humaniste de taille : guérir les cancers graves que sont les sarcomes. Condor est l’appellation d’un consortium, porté par le professeur Antoine Italiano, responsable de l’unité d’Essais cliniques de phase précoce à l’Institut Bergonié (centre régional de lutte contre le cancer). Il rassemble en plus de ce dernier, deux autres experts dans la prise en charge des sarcomes, le centre Gustave-Roussy à Paris et le centre Léon-Bérard à Lyon, tous trois associés à l’Inserm et à trois entreprises de biotechnologie (Domain Thérapeutics, Owkin et Explicyte). Condor est l’un des 17 lauréats nationaux de l’appel à projets de recherche hospitalo-universitaire en santé et va, à ce titre, bénéficier d’une dotation importante, propre à faire avancer une thérapie innovante en cancérologie.
Les sarcomes sont des cancers rares : ils représentent entre 1 % et 2 % de l’ensemble des cancers avec 4 000 à 5 000 nouveaux cas par an en France. 15 % des cancers pédiatriques sont des sarcomes. « La plupart du temps, la chirurgie est le traitement préconisé, précise le professeur Italiano, et dans 40 % des cas, les patients développent des métastases dont l’issue peut être fatale. Les médicaments que l’on connaît se révèlent peu efficaces, et nous cherchons à développer de nouvelles pistes, sur la base de l’immunothérapie. » Principe fondamental de cette dernière : au lieu de s’attaquer directement aux cellules tumorales, l’idée est d’aider le système immunitaire à les reconnaître et les détruire.
Médecine de précision
En fait, nous assistons ici à la création d’une nouvelle génération de programmes de médecine de précision, visant à traiter mieux, voir à sauver des patients jusque-là en impasse thérapeutique. « Elle a pour objectif d’utiliser les technologies les plus avancées, aussi sur le plan du profilage des tumeurs et de leur contexte immunologique, que de l’intégration des données massives, pour proposer des études de recherche clinique innovantes, qui pourront aboutir à des changements cruciaux de paradigme dans la prise en charge actuelle du cancer », ajoute le professeur Italiano. On peut légitimement espérer que ces nouveaux traitements innovants, aient aussi des effets vertueux pour traiter les autres cancers.
Parmi les sept partenaires du consortium Condor, on trouve trois entreprises de biotechnologie dont Explicyte qui est actuellement hébergée à l’Institut Bergonié de Bordeaux. Elle est experte dans le profilage tumoral et périphérique multiparamétrique pour la découverte et le développement de biomarqueurs en immuno-oncologie. Pour résumer, le directeur d’Explicyte, Alban Bessede explique : « Notre mission consiste à aider à identifier les patients qui bénéficieront du traitement, parce que Condor adopte une approche unique, visant à délivrer un arsenal thérapeutique basé sur une meilleure connaissance du micro-environnement tumoral des sarcomes des tissus mous. Devant la complexité des mécanismes de résistance aux traitements actuels, la médecine de précision, à travers les approches de biomarqueurs, offre un avantage évident pour proposer des traitements adaptés à chaque patient. »
Essais cliniques
Les essais cliniques ont déjà démarré, actuellement 300 patients ont pu accéder à ces traitements innovants, sur les cinq années que va durer Condor, 1 500 malades devraient être inclus. « Aujourd’hui, on voit certaines personnes répondre très bien à ce traitement, d’autres résistent, sans que l’on comprenne encore pourquoi, conclut le professeur Italiano. Ce programme va nous permettre aussi de trouver les clefs de ces résistances, afin que le plus de patients possibles voient leur chance de guérison augmenter. »