Covid-19
Sud-Ouest du 21 mars 2021
Un couac pour démarrer
21 millions de Français sont soumis depuis hier aux nouvelles restrictions. Le gouvernement a simplifié à la hâte le dispositif d’attestations, raillé pour sa complexité
C’était la grande foule hier sur les quais de Seine à Paris, pour le premier jour du nouveau confinement. PQR/LE PARISIEN/MAXPPP
Le confinement allégé auquel est soumis un tiers des Français depuis hier a commencé sur un couac avec la suppression express de l’attestation de sortie, moquée pour sa complexité. L’attestation applicable entre 6 et 19 heures dans les 16 départements soumis à de nouvelles restrictions pourra, en particulier, être remplacée en cas de contrôle par un simple document attestant du domicile, y compris une pièce d’identité, a indiqué le gouvernement. Il ne sera plus non plus nécessaire de justifier du motif de ces déplacements jusqu’à 10 km.
« L’attestation et la justification du motif du déplacement continueront d’être requises pour les déplacements de plus de 10 kilomètres (soit au sein du département, soit pour des déplacements interrégionaux) », précise Matignon, dans un communiqué. Quant à l’attestation applicable partout en France pour le couvre-feu (de 19 heures jusqu’à 6 heures), elle reste en vigueur.
Nombreuses critiques
Sitôt paru hier matin, le document de deux pages avait provoqué de nombreuses critiques sur les réseaux sociaux, où il a été moqué comme le comble de la bureaucratie à la française. Cette attestation recensait 15 motifs de sortie, valables dans un rayon de dix kilomètres autour du domicile pour certains (dont les promenades) et 30 km pour d’autres (dont les achats). Seuls certains motifs (consulter un médecin, sortir son chien…) sont acceptés entre 19 heures et 6 heures du matin, période de couvre-feu pour toute la France métropolitaine. Dans un message envoyé samedi matin aux préfets, le ministre Gérald Darmanin a d’ailleurs demandé de faire ce week-end « des contrôles très pédagogiques […] et de faire preuve de beaucoup de compréhension avant de verbaliser (en dernier ressort) ».
Vingt et un millions d’habitants, dont les 12 millions de la région parisienne, sont soumis pour au moins quatre semaines à ces nouvelles restrictions, bien plus légères que le premier confinement national d’il y a un an. Ils sont répartis sur 16 départements (les huit d’Île-de-France, les cinq des Hauts-de-France, la Seine-Maritime, l’Eure et les Alpes-Maritimes). Contrairement aux deux premiers confinements, on peut rester à l’extérieur aussi longtemps qu’on veut, puisqu’on risque davantage d’attraper le Covid-19 à l’intérieur que dehors.
Mais même si les promenades sont autorisées dans un rayon de 10 km, les grands regroupements ne sont pas permis. À Rouen (Seine-Maritime), la plupart des habitants interrogés estiment que ces nouvelles mesures, beaucoup moins strictes qu’il y a un an, ne changeront guère leur quotidien. Tel Charles, 83 ans, qui pourra continuer « à [se] rendre en librairie ». Son seul regret est de ne « plus pouvoir aller au café avec [ses] copains ». Rien ne changera tellement non plus pour Éloi, étudiant de 26 ans, « déjà privé de presque tout depuis un an, notamment des salles de sport ».
« Du sur-mesure »
Dans le centre de Paris à la mi-journée, l’ambiance ne différait pas radicalement d’un autre samedi froid et ensoleillé. « Finalement, ça va être mieux qu’avant puisqu’on va gagner une heure le soir, avec le couvre-feu à 19 heures. Les magasins sont fermés mais je n’achète pas des habits tous les jours », dit Louise, une prof de yoga qui va donner un cours à domicile. « La seule vraie différence, c’est la limite des 10 km. C’est probablement une chose cohérente pour éviter la propagation. » Fleuristes, chocolatiers (Pâques oblige), magasins de musique, coiffeurs ou cordonniers font partie de cet inventaire à la Prévert. Selon le gouvernement, cela porte à 90 000 le nombre de commerces désormais fermés. « Nous faisons du sur-mesure », s’est justifié le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire.
Pas de quoi convaincre le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, qui a fustigé sur Europe 1 « la folie bureaucratique ». « On est soulagés de pouvoir ouvrir mais on a peur de ne pas avoir de clients », a expliqué Maxime Lecomte, cordonnier à Lille, où les rues du centre-ville étaient quasi désertes hier matin avant de se repeupler à la mi-journée. En vertu des nouvelles restrictions, il est désormais interdit de sortir des départements concernés, sauf pour « motif impérieux ». Ces mesures suffiront-elles pour endiguer une « troisième vague » ? « D’autres départements ou régions vont probablement entrer dans ce type de dispositif dans les quinze jours ou trois semaines », a pronostiqué dans « Nice-Matin » un membre du Conseil scientifique, Olivier Guérin.