Covid-19
Sud-Ouest du 30 janvier 2021
Sud-Ouest du 30 janvier 2021
Les mesures de la dernière chance
COVID-19 À l’issue d’un Conseil de défense surprise, Jean Castex a, hier soir, resserré d’un cran l’étau sanitaire. Le spectre du reconfinement est toujours là
Jean Castex, lors de ses annonces, hier. PHOTO BENOIT TESSIER/M
Il était 17 h 30, hier, lorsque l’Élysée a annoncé, à la surprise générale, la tenue d’un nouveau Conseil de défense autour d’Emmanuel Macron et de Jean Castex. Alors que ces dernières heures, les spéculations allaient bon train sur une possible, sinon certaine, allocution du chef de l’État soit dimanche, soit lundi, soit très vite, c’est finalement le Premier ministre qui a pris la parole à l’issue de cette réunion qui ne figurait à aucun agenda. Depuis le perron de l’Élysée, le locataire de Matignon l’a reconnu: devant l’augmentation du nombre de contaminations quotidiennes, «la question du reconfinement se pose ». Mais, a-t-il aussitôt ajouté: «Nous considérons que nous pouvons encore nous donner une chance de l’éviter.»
Quelle acceptabilité?
D’où cette nouvelle série de mesures qu’il a annoncée en complément du couvre-feu. Lequel, ce matin, reste bien entendu toujours en vigueur et généralisé sur l’ensemble du territoire. Concrètement, à partir de dimanche, les frontières extérieures de l’Union européenne seront fermées. « Toute entrée en France et toute sortie de notre territoire à destination ou en provenance d’un pays extérieur à l’Union européenne sera interdite, sauf motif impérieux », a précisé Jean Castex. Toujours sur ce point, il a ajouté qu’un test PCR négatif serait demandé pour toute entrée en France en provenance d’un pays de l’Union, «à l’exception des travailleurs transfrontaliers ». Par ailleurs, «tous les déplacements en provenance et en direction de tous nos territoires ultramarins seront également soumis désormais à la production de motifs impérieux à compter de ce dimanche.» En conséquence, ceux qui espéraient y passer leurs vacances de février ne le pourront pas. Pas plus qu’ils ne pourront aller au ski.
En outre, toujours à compter de dimanche minuit, les centres commerciaux non-alimentaires de plus de 20 000 mètres carrés seront fermés (lire par ailleurs). Enfin, sur le front de l’emploi, le télétravail, qui devait s’assouplir début janvier, est appelé à se renforcer partout où c’est possible.
En clair, l’heure n’est donc pas encore au reconfinement, mais, à écouter le Premier ministre hier soir, cette perspective n’a jamais été aussi proche. Néanmoins, si ces nouvelles mesures apparaissent bien comme celles de la dernière chance, elles traduisent aussi toute la réticence de l’exécutif à resserrer davantage l’étau sanitaire.
Certes, les confinements de mars et de novembre, avec leurs nuances, ont porté leurs fruits sur le plan sanitaire. Mais impossible d’ignorer que, depuis quelques jours, la question de cette option s’est aussi déplacée sur le terrain glissant de l’acceptabilité.
La menace des variants
Les étudiants, qui se dirigent tout droit vers une deuxième année blanche, sont aujourd’hui à bout. Si Emmanuel Macron les a autorisés à reprendre les cours un jour par semaine, leur détresse, psychologique et financière, est palpable. Les salariés, qu’ils soient en présentiel ou en télétravail, s’inquiètent d’une possible fermeture des écoles et d’un allongement des vacances de février d’une à deux semaines supplémentaires. De leur côté, les hôteliers, les restaurateurs et les acteurs de la culture, malgré les aides, n’ont toujours pas d’horizon. Quant aux commerçants, qui ont rouvert en décembre, ils redoutent à présent de tirer à nouveau leurs rideaux.Après bientôt un an de crise sanitaire, c’est bien ce risque de ras-le-bol et de lassitude qui a conduit l’exécutif à donner ce léger tour de vis supplémentaire plus tôt qu’à cadenasser le pays en fermant les écoles et l’ensemble des commerces non-essentiels. Cependant, si le chef de l’État et le Premier ministre ont choisi de temporiser, cela n’a pas empêché Jean Castex d’annoncer un renforcement des contrôles du couvre-feu, des fêtes clandestines et de «l’ouverture illégale» des restaurants. «Les dérives de quelques-uns ne doivent pas ruiner les efforts de tous», a-t-il averti, ajoutant que les policiers et les gendarmes ont été appelés à faire preuve de fermeté. Il n’empêche, ce matin la situation reste toujours aussi préoccupante. Comme l’a rappelé le Premier ministre, hier soir, la présence des variants britannique et sudafricain continue de faire peser « un fort risque d’accélération de l’épidémie.» Et pour ne rien arranger, si 1,5million de personnes ont déjà reçu leur première injection, la France, comme les autres pays européens, doit faire face à une baisse des livraisons de vaccins. À bien des égards, les prochains jours seront donc déterminants.