Covid-19
Sud-Ouest du 29 juillet 2020
Surveillance, données personnelles : le coronavirus a-t-il fait tomber les barrières ?
NUMÉRIQUE Le Covid a accéléré la numérisation de la société. Des dispositifs intrusifs se sont imposés dans la lutte contre le virus, faisant tomber des digues. Temporairement ?
Le Covid facilite-t-il l’émergence d’une « techno police », comme le pense l’ONG la Quadrature du net, spécialisée dans la défense des libertés informatiques ? © Crédit photo : Gérard Julien/AFP
Une pile d’initiatives. À l’aune du Covid, l’éternel débat entre libertés et sécurité s’est déporté ces derniers mois sur le domaine de la santé. Et de la technologie. Comme souvent, en période de crise la balance a dans un premier temps tendance à pencher vers la sécurité. Il suffit de parcourir les multiples avis et décisions de la Cnil de ces derniers mois, pour mesurer la tentation qui s’est emparée du monde de la « tech ».
Emploi de drones par les forces de l’ordre, parfois sans base légale, pour surveiller les sorties des confinés (plus de 500 interventions en deux mois), caméras thermiques à l’entrée des écoles, reconnaissance faciale pour traquer les récalcitrants au port du masque dans des lieux publics, application de contact tracing, fichiers géants de données de santé…
Nombre de ces dispositifs n’étaient certes pas nouveaux. Mais la crise du Covid a marqué une tentation d’accélération qui semble avoir dans un premier temps submergé les réserves qui autrefois faisaient barrière sur l’application de certaines technologies, notamment de surveillance. Le Covid facilite-t-il l’émergence d’une « techno police », comme le pense l’ONG la Quadrature du net, spécialisée dans la défense des libertés informatiques ?
Quid de l’« effet cliquet » ?
« Sur un plan philosophique, des digues ont été battues en brèche par cette idée de mettre le numérique au service de la lutte contre le Covid. La noble cause ne devait pas se heurter à de grands principes. Les élans à la fois des États et des grands opérateurs ont été un challenge pour les autorités de contrôle de données », relève le sénateur (UDI) Loïc Hervé, membre de la mission de suivi de la loi d’urgence et par ailleurs commissaire à la Cnil.
Bien sûr, la suractivité ces dernières semaines des autorités de régulation (Cnil, Conseil d’État…) est aussi un signe de la vitalité des principes qui régulent l’équilibre entre libertés et sécurité. Reste à savoir, face à une menace appelée à durer, voire à se renouveler, comment notre société appréhendera le fameux « effet cliquet » qui veut qu’en termes de sécurité, les dérogations et accommodements finissent toujours par se pérenniser au moins en partie.