Champs captants : Le Président de la DFCI de Saumos prend la parole et fait des propositions
Le président de la DFCI de Saumos parle de l’eau du Médoc
A l’approche d’une décision irréversible peut-être à la fin de cette année 2018, pour alimenter la Métropole et le Département en eau potable, le président de la DFCI de Saumos et son conseil syndical sont mobilisés.
Nous, sylviculteurs de Saumos, sommes toujours fermement opposés au champ captant des Landes du Médoc dans sa configuration actuelle. La motion de la DFCI de Saumos votée à l’unanimité le 14 octobre 2017 reste complètement d’actualité.
J’ ACCUSE
J’accuse en effet tous nos décideurs – élus en tête, de tous bords - d’être en train d’organiser un gaspillage sans précédent d’une ressource exceptionnelle, notre eau souterraine du Médoc.
Je m’explique : cette nappe d’eau sous nos pieds à 200 mètres de profondeur possède une extraordinaire qualité, celle d’être totalement exempte de nitrates. Cette caractéristique ne se dément pas, puisque cela fait bientôt 40 ans que c’est celle que nous buvons à Saumos et au Temple. Mais c’est un trésor convoité ! Pensez donc, sans traitement ou presque, on pourrait la boire directement en sortie de forage. Mais aussi que d’envieux pour venir la capter sur nos territoires. On peut même la diluer et améliorer la potabilité de bien d’autres captages, où l’eau est de qualité bien médiocre ou même déjà polluée !!
Bien plus, certains la puisent dans la même nappe, du côté du Bassin. Et là, cette eau « de source » est si précieuse, combien vaut-elle alors ? Plusieurs centaines de fois le prix de l’eau à notre robinet…Quelle aubaine !
Quelle est donc l’utilité publique de cette eau ?
L’eau potable oui, celle que l’on boit ou qui sert à cuisiner, oui, elle est sans aucun doute le patrimoine de tous, nul ne le conteste.
Mais l’eau pour se laver, pour les toilettes, pour arroser le jardin, laver la voiture ou les locaux, remplir la piscine, bref pour notre confort, celle-là n’a nul besoin d’une potabilité irréprochable : est ce l’utilité publique que d’utiliser de la sorte notre « eau de source » du Médoc ? En faire cet usage, c’est du gaspillage caractérisé, surtout de nos jours où l’on sait maintenant que la bonne eau va manquer dans un futur proche, changement climatique oblige !
Oui à l’eau potable de qualité, non à cette même eau utilisée pour notre de confort.
Car l’eau doit et peut être utile à plusieurs usages. Le deuxième usage, c’est ce que l’on appelle «l’eau grise».
Ne pas gaspiller, c’est d’abord de faire un double usage de l’eau. Et les techniciens de l’eau chez Suez, chez Véolia, ils savent faire, ce n’est pas nouveau !
Ne pas gaspiller, c’est moins tirer sur la ressource ! Et moins tirer sur la ressource des nappes, c’est davantage protéger l’environnement.
La forêt sera affectée, faiblement nous disent les études, mais tout n’a pas été pris en compte. Et l’administration n’a aucun moyen de contrôler !! Ou bien est-elle muselée ? Pourtant, ce qui ressort, c’est que une partie des eaux de surface, celle qui provient de la pluie, contribue à alimenter le futur captage. De fait, la forêt « attire » la pluie : 14% de pluviométrie supplémentaire au dessus des forêts, c’est un chiffre moyen, mais ce n’est pas rien ! Autant dire que la forêt est un atout pour le champ captant des landes du Médoc. On devrait même le rebaptiser « champ captant des forêts du Médoc ».
Avec le champ captant, la forêt produira moins de bois nous disent encore les études : combien, on ne sait pas exactement. Par ailleurs, l’Etat nous demande de « sortir » toujours plus de bois de nos forêts. Où est la cohérence ?
Moins d’eau de surface, moins de biodiversité, moins de bois. Et l’Europe qui a largement financé la reconstitution de la forêt médocaine, suite aux tempêtes de 1999 et 2009 a-t-elle donné son feu vert au projet ? Où est l’intérêt général ?
Que les propriétaires ne rêvent pas trop : autour du champ captant, il y aura un périmètre de protection, qui imposera des règles, notamment en matière d’urbanisme. Moins il y a d’habitants sur les zones de drainance, mieux c’est. Pas de construction nouvelle, pas de développement , ce sera la règle ou du moins le principe, pour nos communes où il n’existe pas de station d’épuration. Ou est l’intérêt général ?
Après un simulacre de concertation depuis bientôt 4 années, chacun campe sur ses positions. Alors que faire maintenant dans nos communes ? Si finalement, il devait y avoir une négociation, chacun devra faire un pas.
Certains estiment que la voie du dessalement de l’eau de mer devrait être sérieusement étudiée. Ce n’est pas réaliste, car les techniques de dessalement consomment une quantité considérable d’énergie, surtout à l’échelle d’un tel projet ; de plus ces techniques génèrent des saumures polluantes qu’il faudrait bien rejeter quelque part.
Alors, demandons à Bordeaux Métropole, la plus importante consommatrice d’eau de s’engager résolument dans l’utilisation des eaux recyclées (les eaux grises) avec un objectif de consommation de 5 Mm3 par an dans un premier temps.
Donnons en contrepartie notre accord pour exploiter le champ captant à 50% de sa capacité envisagée, à 5 Mm3 par an pendant une période probatoire de quelques années, en réservant à l’eau du Médoc, un usage exclusif d’eau potable.
Au delà de cette période probatoire, la situation nouvelle pourrait être réévaluée. Augmenter la production du champ captant des forêts du Médoc, pourquoi pas ? Autant que la production d’eau grise, pourquoi pas ? Et, rêvons un peu, dans la mesure où aucune nuisance n’aurait été décelée, ne pourrait-on pas consacrer quelques milliers de m3 de cette eau de source à une commercialisation en bouteille, histoire de créer pour les communes du champ captant, une ressource fiscale d’appoint.
N’est ce pas là une piste – nous n’avons pas d’autre prétention – pour mieux discerner l’intérêt général ?
Jean PERAGALLO,
Docteur en géologie de l’environnement,
Ingénieur géologue,
Gérant de groupements forestiers
Président de la DFCI de Saumos