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30 mai 2022

Urgences submergées

Sud-Ouest du 28 mai 2022

2022 05 28 SO Bordeaux Les urgences du privé déjà submergées

Sud-Ouest du 28 mai 2022 

BORDEAUX / FERMETURE NOCTURNE DES URGENCES AU CHU Les cliniques privées très sollicitées 

Face à la fermeture de nuit des urgences de Pellegrin, le public s’est replié vers les cliniques du groupe privé Bordeaux-Nord

2022 05 28 cliniqueL’activité aux urgences de la polyclinique Bordeaux-Nord monte depuis la fermeture nocturne des urgences adultes de Pellegrin. GUILLAUME BONNAUD / « SUD OUEST » 

Une histoire de vases communicants. Jusqu’au 18 mai dernier, date de la fermeture nocturne des urgences de l’hôpital Pellegrin de Bordeaux aux patients hors régulation, le CHU tenait la corde avec la prise en charge de 40 % des urgences de l’agglomération. Les deux polycliniques du groupe privé Bordeaux-Nord, celle de la rive droite et de la rive gauche tournaient autour de 35 %. Le rapport s’est inversé en quelques jours et désormais, c’est le groupe privé qui est passé devant. 

Philippe Cruette, directeur général du groupe, fulmine : « J’ai découvert, tout comme mes équipes d’urgentistes, par voie de presse, les décisions du CHU et de l’Agence régionale de santé. Nous n’avons jamais été concertés alors que nous sommes sur le territoire le premier recours aux urgences après l’hôpital. Cela n’est pas sans conséquence pour nous ! » 

En ce milieu de semaine, l’équipe est au complet. La salle d’attente est calme, avec des patients qui arrivent au compte-goutte. Il est 14 heures. « Le calme avant la ruée, tempère le docteur Fabrice Donck, coordonnateur du service. C’est surtout les fins d’après-midi et les nuits qui sont difficiles. On tient la barque, mais on est constamment à flux tendu et notre équipe tient à peu de chose. Si l’un de nous craque, c’est tout le bateau qui coule », commence-t-il. 

« Grosse inquiétude » 

De fait, les boxes de consultation sont occupés, les infirmières et aides-soignantes au pas de course se concentrent sur leurs tâches devant les malades hébétés, allongés sur des brancards. Un homme blessé crie sa douleur. 

Ils sont 12 médecins urgentistes, un seul interne – alors qu’il en faudrait une dizaine – 24 infirmiers et 11 aides-soignants. Voilà « le bateau » des urgences de Bordeaux-Nord. Sonia Dillar, cadre aux urgences « baby-sitte » ses troupes : « Ils ont été secoués par l’annonce de la fermeture des urgences de Pellegrin. Je les écoute beaucoup, on doit les accompagner et les rassurer, admet-elle. Il paraît que la clinique mutualiste qui assure aussi un service d’urgence envisage de fermer au mois d’août. Tout va nous retomber dessus, on attend la vague. Si on tient le cap, c’est parce qu’on fonctionne sur l’entraide et la réassurance. Le moindre dysfonctionnement fera tout exploser. » 

Le docteur Donck espère que, face à cette situation de crise, une dotation supplémentaire d’internes lui sera accordée. « La direction du Groupe est solidaire et nous écoute, dit-il. Je pense que c’est ce qui fait la différence. Nous avons tous la volonté de rester ouverts coûte que coûte parce qu’on ne peut nier l’effet château de cartes. Les autorités de tutelle doivent l’anticiper : la maison brûle comme disait Chirac et ils regardent ailleurs. » 

« Concertation » 

Philippe Cruette s’étrangle lorsqu’il évoque la crise Covid durant laquelle le Groupe Bordeaux-Nord s’est retrouvé en seconde ligne, derrière le CHU : « Souvenez-vous, nos médecins, nos paramédicaux… Tout le monde a été sur le pont. Nous avions devant la polyclinique un barnum pour accueillir les patients, aussi important que celui du CHU. La Cour des comptes, dans son dernier rapport, a écrit que nous avions joué un rôle de niveau 1 pendant la crise. C’est très rare. Je rappelle que nous sommes un établissement de santé classé niveau 3. À ce moment là, l’ARS a su coordonner, pourquoi pas aujourd’hui ? » 

Le directeur général craint pour ses troupes, les cliniques connaissent comme les hôpitaux des démissions et des difficultés à recruter du personnel soignant. Si jamais ses urgences sont contraintes de fermer, alors il perdra son autorisation d’activité, obtenue de haute lutte. « Qui va soigner les gens ici ? » questionne-t-il. Il appelle à une concertation de tous les acteurs, ARS, CHU, politiques notamment, pour « sauver les urgences » de l’agglomération bordelaise. 

« Il faut ouvrir un autre site pour l’accueil d’urgences non-vitales, ce qui permettrait de désengorger tous les services d’urgence vitales, lâche-t-il. Nous sommes prêts à déployer rapidement cette solution. Il ne tient qu’à la puissance publique de délivrer les autorisations nécessaires en imagerie pour répondre aux besoins de la population. On peut accueillir ce service à la clinique Thiers, à la polyclinique Bordeaux Caudéran ou à la nouvelle clinique Bel-Air. » Une nécessité, avant l’été qui risque d’être dangereux. Dans l’agglomération bordelaise, les urgentistes, sont sur le pied de guerre face au long week-end de l’Ascension qui pourrait être un avant-goût de l’été.

Sud-Ouest du 28 mai 2022 

Des urgences en souffrance dans tout le département 

Si la situation est tendue dans l’agglomération bordelaise, de nombreux services d’urgences girondins sont eux aussi pris d’assaut

2022 05 28 des urgences

Au CHU de Bordeaux, les urgences adultes de l’hôpital Pellegrin n’accueillent plus la nuit que les patients passés par la régulation du centre 15, depuis le 18 mai. Les cas graves, eux, sont directement conduits par le SAMU, les pompiers ou sur prescription médicale. Et ce, à compter de 17 heures le soir et jusqu’à 8 heures du matin. 

Les urgences de Sainte-Foy-LaGrande ont également fermé plusieurs nuits en mai, faute de soignants. Dans l’agglomération bordelaise, outre les urgences adultes de l’hôpital Pellegrin, les services de l’hôpital Saint-André fonctionnent normalement. Les urgences cardiaques accueillent encore moins de 20 patients par nuit à l’hôpital Haut-Lévêque. Les urgences pédiatriques de l’hôpital des enfants, elles, sont ouvertes en permanence. Les habitants de l’agglomération ont encore la possibilité de filer à la polyclinique Bordeaux-Nord et la clinique Bordeaux rive droite. 

La Gironde essoufflée 

Les nouveaux services de santé de l’hôpital du Tondu viennent d’ouvrir sur la rive droite mais sont encore peu fréquentés. La clinique mutualiste de Pessac est en souffrance et annonce une probable fermeture au mois d’août. Ce qui poserait un gros souci. En mai, elle a vu environ 80 passages par jour. L’hôpital Robert Picqué propose aussi des urgences qui, hélas, ont signalé de grosses tensions. 

L’hôpital d’Arcachon voit passer chaque jour une centaine de patients aux urgences, pour environ 130 à l’hôpital de Libourne. À Langon, les urgences hospitalières accueillent une soixantaine de passages par jour, contre une cinquantaine à Blaye… Quant à la clinique mutualiste de Lesparre, dont les urgences soignent chaque jour environ une quarantaine de personnes, les nouvelles ne sont pas bonnes non plus. 

Idem pour l’établissement privé d’Arès. Partout, les services hospitaliers de Gironde s’essoufflent et ne tiennent qu’à un fil. Face à cette situation critique, l’Agence régionale de santé rappelle aux usagers qu’il vaut mieux, avant d’aller aux urgences, appeler le 15 et laisser « les urgences aux urgences ». I. C.

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