Covid-19

Sud-Ouest du 13 juillet 2021

Sud-Ouest du 13 juillet 2021 

Pour Emmanuel Macron, la vaccination... quoi qu’il en coûte 

Sans battre en retraite sur le front des réformes économiques, Emmanuel Macron a clairement mis la pression sur les non-vaccinés hier soir

Un pass sanitaire sera obligatoire, dès août, pour se rendre au restaurant et en terrasse. “SO” 

Que retenir de cette huitième et longue allocution présidentielle depuis le début de l’épidémie ? Que si Emmanuel Macron a cette fois choisi la tour Eiffel comme fond d’écran, le mode de vie à la française ne sera bientôt plus qu’une histoire parallèle, à deux vitesses selon que vous soyez ou non vacciné. Un mois et demi à peine après avoir trinqué en terrasse à la santé de notre « liberté » retrouvée, c’est avec une légère gueule de bois sanitaire qu’une partie de la population se réveillera ainsi mardi matin. Terminé le temps passé à convaincre, voici celui de la contrainte pour les antivax et autres réticents, soit encore plus de 30 millions de personnes. 

Privés de salaire 

Longtemps taboue avant qu’un quasi-consensus politique n’aide le gouvernement à franchir le pas, la vaccination sera donc bel et bien obligatoire pour les personnels soignants et non-soignants des hôpitaux, mais aussi pour tous les professionnels ou bénévoles travaillant au contact de personnes âgées ou fragiles, y compris à domicile. 

Passé la mi-septembre, « des contrôles seront opérés et des sanctions prises », a prévenu le président, sans que l’on sache pour l’heure le détail de cet immense défi collatéral. Un peu plus tard dans la soirée, le ministre de la Santé aura pourtant dévoilé un aspect bien réel de la menace, pour ne pas dire sonnant et trébuchant : « À partir du 15 septembre, si vous êtes soignant et que vous n’êtes pas vacciné, vous ne pourrez plus travailler et vous ne serez plus payé. » 

Partout le pass sanitaire 

Pour tous les autres, l’extension du domaine de la lutte anti-Covid sera celle du pass sanitaire entre le 21 juillet et le début du mois d’août. Si le chef de l’État n’écarte pas à terme l’idée d’imposer le vaccin à tous les Français, c’est une peine de sursis avec mise à l’épreuve qu’il aura déjà prononcée lundi soir : « Une approche plus simple, reconnaître le civisme et faire porter les restrictions sur les non-vaccinés plutôt que par tous ». 

Ainsi restaurants et cafés ne refermeront pas leurs portes, mais devront en interdire le passage aux clients ne présentant pas une preuve de vaccination complète ou bien un test PCR récent, quand ceux-là d’ailleurs ne seront plus remboursés - sauf prescription médicale - à compter du mois d’octobre. La carotte et le bâton également pour l’ensemble des lieux de loisirs et de culture rassemblant plus de cinquante personnes, mais aussi dans les centres commerciaux, établissements de santé, avions, trains et cars parcourant de longues distances. Un ultimatum visiblement payant, le site de prise de rendez-vous Doctolib ayant été pris d’assaut puis saturé sitôt la grand-messe présidentielle achevée. 

Déjà candidat ? 

Si la France n’est plus tout à fait en guerre, c’est donc la mobilisation générale pour la vaccination qu’a sonnée le président au début d’un été qui, s’il ne sera pas forcément meurtrier, promet d’être compliqué par le variant Delta. Notons au passage l’annonce pour la rentrée de campagnes spécialement déployées du collège jusqu’à l’université, mais aussi un rappel pour les tout premiers vaccinés. « Neuf millions de doses qui n’ont pas été injectées vous attendent dès aujourd’hui, et nos commandes continuent d’arriver. » 

Ainsi personne ne pourra prétendre ne pas avoir été prévenu de ce péril imminent, comme nul n’est désormais censé ignorer qu’Emmanuel Macron semble déjà en campagne. À la seizième minute de son allocution (sur vingt-huit), le président aura soudainement troqué sa blouse blanche pour un costume taillé sur les mesures d’un candidat. 

Passée l’ordonnance médicale, des prescriptions très politiques pour ne surtout pas donner l’impression de battre en retraite à neuf petits mois de la présidentielle. À court terme d’abord, avec l’annonce d’un « revenu d’engagement » pour les jeunes sans emploi, mais surtout de cette réforme de l’assurance-chômage – « pleinement mise en œuvre au mois d’octobre » – que vient pourtant de suspendre le Conseil d’État. Viendra ensuite le temps de la réforme des retraites, « dès que les conditions sanitaires seront réunies ».