Covid-19
Sud-Ouest du 16 mars 2021
AstraZeneca suspendu : nouveau coup dur
C’est depuis Montauban qu’Emmanuel Macron a annoncé la suspension du vaccin AstraZeneca. L’Agence européenne du médicament doit se prononcer rapidement
Déjà marquée par une série de couacs et des retards de livraisons, la campagne vaccinale serait-elle à un nouveau tournant ? Une certitude : les prochaines journées risquent d’être particulièrement longues. En effet, c’est ce jeudi 18 mars, en fin d’après-midi, que l’Agence européenne du médicament doit rendre son avis sur un potentiel risque du vaccin AstraZeneca. Une inquiétude qui, sur l’ensemble du continent, n’a cessé de prendre de l’ampleur au point de pousser, lundi, Emmanuel Macron à prononcer, à son tour, la suspension de ce vaccin. Une annonce faite en conclusion du premier sommet franco-espagnol de son quinquennat à Montauban.
Alors que depuis la mi-journée, il menait une série de négociations avec Pedro Sanchez, le président du gouvernement espagnol, on apprenait que l’Allemagne suspendait, elle aussi, le vaccin AstraZeneca. Rejoignant le club des pays ayant déjà pris une telle mesure après des effets indésirables plus ou moins sévères – thromboses, embolies pulmonaires – et des décès, à savoir : la Norvège, l’Autriche, l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie, le Luxembourg, le Danemark, l’Italie, les Pays-Bas… Sachant qu’un peu plus tôt dans la matinée, les sapeurs-pompiers des Bouches-du-Rhône avaient, eux aussi, annoncé renoncer à ce vaccin. Et ce en réaction à l’hospitalisation d’un pompier d’Arles pour une arythmie cardiaque après sa première injection.
Une position intenable
Dans ces conditions, la position française devenait intenable, malgré les propos de Jean Castex dimanche soir. Lors d’une interview sur Twitch, le Premier ministre avait tenu à se montrer rassurant : « À ce stade, il faut avoir confiance dans ce vaccin et se faire vacciner […] sinon on aura des retards dans la vaccination et la crise sanitaire durera longtemps. » En vain.
Moins de 24 heures plus tard, Emmanuel Macron a donc décidé de mettre sur pause l’AstraZeneca. Et ce « jusqu’à » ce mardi après-midi. Le temps donc que l’Agence européenne du médicament se prononce. Une décision lourde d’enjeux.
En effet, si la France peut s’appuyer sur deux autres vaccins, ceux de Pfizer et de Moderna, AstraZeneca n’en reste pas moins un rouage essentiel de cette campagne. C’est sur lui en particulier que s’appuient les médecins libéraux pour vacciner les 50-64 ans atteints de comorbidité. Soit 2 millions de personnes. Voilà pourquoi Emmanuel Macron a aussitôt précisé qu’il espérait « reprendre vite » avec AstraZeneca.
Quid des objectifs ?
Toutefois, si l’Agence européenne du médicament devait revoir son appréciation et prolonger cette suspension, ce serait assurément un coup dur.
Car, même si la France attend, en avril, 19,3 millions de doses de Pfizer et 3,2 millions de Moderna, difficile sans AstraZeneca d’atteindre les objectifs fixés par le Premier ministre, le 4 mars. À savoir : dix millions de personnes vaccinées parmi les plus vulnérables, en première injection, à la mi-avril. Au moins 20 millions à la mi-mai. Et 30 millions d’ici à l’été.
Une perspective à prendre désormais avec des pincettes. Et ce d’autant plus qu’aux doutes entourant ce vaccin s’ajoute l’annonce faite samedi par le laboratoire d’une nouvelle réduction des livraisons à venir. Le tableau s’est donc singulièrement assombri.
Vers un reconfinement ?
Alors que le niveau de contaminations reste toujours élevé, particulièrement en Île-de-France, ce nouveau coup dur peut-il inciter Emmanuel Macron à décider un éventuel reconfinement, ce qu’il se refuse à faire depuis janvier ? Rien ne l’indique.
En effet, le chef de l’État plaide toujours pour une analyse « adaptée » et « en regardant la réalité de l’épidémie ville par ville, territoire par territoire ».
Un reconfinement total ne semble donc pas à l’ordre du jour. Au contraire d’une réponse toujours plus régionalisée.
Il n’empêche, si de nouvelles décisions devraient être prises dans les jours « qui viennent », Emmanuel Macron veut aussi redonner de la « lisibilité » sur « les prochaines étapes ». Et la première commence dès ce jeudi avec les recommandations sur le vaccin AstraZeneca.