Sud-Ouest du 27 janvier 2021
Sud-Ouest du 27 janvier 2021
Cap sur la seconde injection
COVID-19 Le délai entre la première dose du vaccin et son rappel ne sera pas étendu au-delà de 28 jours. Conséquence, la campagne de la seconde injection débutera en février
Plus d’un million de personnes ont été vaccinées en France. « SO »
Alors que la menace d’un troisième confinement semble s’être temporairement éloignée, Emmanuel Macron ayant lui aussi décidé de laisser sa chance au couvre-feu – au moins jusqu’à la fin de la semaine –, le gouvernement reste, lui, focalisé sur la campagne de vaccination.
En attendant donc une prochaine intervention du chef de l’État – annoncée pour aujourd’hui avant d’être démentie… –, c’est Olivier Véran, le ministre de la Santé, qui est monté au créneau hier. Et ce pour trancher un autre débat: faut-il, oui ou non, allonger le délai entre la primo injection du vaccin et son rappel ? Dit autrement, alors que trois à quatre semaines d’intervalle séparent la première dose de la seconde, est-il pertinent de passer à cinq ou six semaines ? Une question qui, à la faveur des débuts poussifs de la vaccination, a pris de l’ampleur ces derniers jours dans la communauté scientifique. Ce décalage dans le temps offrant l’avantage de pouvoir continuer à vacciner un plus grand nombre de personnes fragiles avant d’ouvrir cette séquence de la seconde injection.
Trop d’incertitudes
Un débat auquel Olivier Véran a mis un terme, hier, en choisissant de ne pas toucher à ce délai entre la primo injection et le rappel vaccinal. Plusieurs raisons à cela. D’abord, le rythme de la vaccination s’est singulièrement accéléré. Alors que, fin décembre, le gouvernement espérait avoir vacciné un million de personnes fin janvier, ce cap a été franchi lundi. Et selon les modélisations établies, étendre le délai entre les deux piqûres n’aurait qu’un «impact mineur» sur le rythme de la vaccination.
Mais surtout, c’est le manque de données concernant un tel scénario qui a convaincu le ministre de la Santé de ne pas s’aventurer dans cette option. Lequel a pointé du doigt: «L’absence d’essais cliniques sur une injection à 42 jours du rappel vaccinal, la faiblesse des connaissances scientifiques sur la protection des personnes entre deux injections et l’absence de données permettant de croire à la protection des personnes entre deux doses face aux variants.»
Vingt-et-un jours dans les Ehpad
Or, comme l’a rappelé, hier, le professeur Alain Fischer, le monsieur vaccin du gouvernement : « Nous n’avons aucune information sur l’efficacité dans la durée de la première dose.» À la lueur de ces incertitudes, d’autant plus grandes avec la présence des variants anglais et sud-africain, décision a donc été prise de ne pas aller au-delà des 28jours requis pour administrer la seconde dose. Avec cette nuance que cet intervalle a même été ramené à 21 jours dans les Ehpad. Et ce, pour ne pas perdre de temps face au rebond de l’épidémie.
Sur ce point, le ministère de la Santé prévoit 130 000 nouvelles primo injections dans ces établissements cette semaine et 62000 la semaine prochaine. À la fin janvier, 75 % des résidents devraient avoir reçu leur première injection.
1,5 million fin février
En conséquence, une part importante des vaccins disponibles en février sera consacrée au début de la seconde injection chez les personnes vaccinées début janvier. Lesquelles n’auront donc pas besoin de rappeler leur médecin pour prendre un nouveau rendez-vous. Tout sauf anecdotique. En effet, allonger ce délai entre les deux doses aurait entraîné plus d’un million de coups de fil... et renvoyé le gouvernement à ses errements des derniers mois, sur les masques notamment. Selon les projections du ministère de la Santé, et sous réserve qu’il n’y ait pas de retard d’approvisionnement, à la fin du mois prochain, 1,5 million de personnes pourraient avoir reçu leurs deux injections. Et 3,1millions de personnes, la première. Mais l’ouverture de cette nouvelle phase fera mécaniquement chuter le nombre de primo injection. Au profit donc de la seconde.
Sud-Ouest du 27 janvier 2021
Les doses de vaccin viennent à manquer
COVID-19 Vingt jours après le lancement du vaccin dans le département, tous les centres girondins sont saturés, la faute à un nombre de doses insuffisant selon l’ARS
23 028 Girondins ont été vaccinés (données du 25janvier). PHOTO THIERRY DAVID
«En raison d’une forte demande, ce centre n’a plus de disponibilités, 1 092 vaccinations vont avoir lieu dans les 28 prochains jours.» Le nombre varie en fonction des centres mais le message reste le même sur tous les sites de prise de rendez-vous. Les quinze centres de vaccination girondins semblent globalement saturés.
La Maison du département de la promotion de la santé, à Bordeaux, ne fait pas exception. «Il n’est plus possible de prendre rendez-vous sur le site mais le téléphone n’arrête pas de sonner. Nous avons une liste d’attente avec plusieurs centaines de personnes », affirme la docteure France Ahano-Ducourneau, cheffe de service.
Un engouement inattendu
« C’est comme pour le dépistage, nous n’avions pas anticipé cet engouement. Au début de la campagne, nous étions même inquiets de ne pas réussir à convaincre la population de se faire vacciner», plaide Olivier Serre, directeur de la délégation départementale de la Gironde à l’Agence régionale de santé (ARS).
Les personnes de plus de 75 ans sont la cible principale actuelle. Rémi et Monique, 90 ans, ont pris rendez-vous dès le lancement de ce centre, il y a une semaine. Ce matin, ils ont reçu la première injection. «Nous sommes soulagés d’avoir eu un créneau. Tout s’est très bien passé », raconte le couple. Autour d’eux, dans la salle d’attente, des affiches incitent à se protéger, à utiliser des préservatifs et à se faire dépister. D’ordinaire, ce centre accueille un public plus jeune puisque ce sont les locaux du Centre gratuit d’information, de dépistage et de diagnostic (Cegidd). Depuis le 18janvier, les matinées sont réservées à la vaccination contre le Covid-19. « Nous vaccinons trente personnes chaque matin parce que nous avons trente doses à disposition par jour, pas une de plus », explique la docteure France Ahano-Ducourneau. C’est là que le bât blesse: le nombre de doses est insuffisant pour répondre à la demande. Le directeur de la délégation départementale de la Gironde à l’ARS constate: «C’est une gestion à flux tendu. Nous répartissons les doses en fonction de la proportion de personnes âgées sur les territoires ».
Ces doses sont si précieuses que les infirmières du centre de vaccination en prennent le plus grand soin. « C’est un geste technique, on se met la pression pour n’en perdre aucune goutte », confie Virignie Ladoues, infirmière volontaire. Elle explique : « on doit diluer le vaccin puis en faire six doses. Il ne faut pas tirer trop vite sinon il y a une surpression et on perd quelques jets donc une dose».
Une «sacrée logistique»
Pour ne gâcher aucune dose, si un rendez-vous n’est pas honoré, l’équipe contacte immédiatement la première personne sur la liste d’attente. « Une fois dilué, le vaccin doit être administré dans les six heures», précise la cheffe de service.
Dans le centre, trois médecins et trois infirmières reçoivent les patients. Les premiers vérifient qu’il n’y a pas de contre-indication à faire le vaccin. Puis, les infirmières administrent l’injection, tant attendue. Après cela, chaque personne reste quinze minutes en observation pour qu’une éventuelle réaction de type allergique, par exemple, puisse être détectée. « C’est une sacrée logistique», reconnaît la coordinatrice du jour Nathalie Gendre. «Nous devons nous adapter aux recommandations du gouvernement en permanence », ajoute France Ahano-Ducourneau. La dernière en date: laisser un délai de quatre semaines au lieu de trois entre les deux injections. Il faut donc décaler les rendez-vous, pour laisser le plus de créneaux possible pour les premières piqûres.
Certains sont si impatients de se faire vacciner, qu’ils sont prêts à changer de département. « On a constaté que certains Girondins prennent des rendez-vous en Charente ou en Dordogne. Le problème c’est qu’ils s’inscrivent sans forcément annuler quand ils ont trouvé une place ailleurs», regrette le délégué départemental de l’ARS.
Pour répondre à cette demande, deux nouveaux centres devraient bientôt ouvrir dans le département, l’un dans le Sud-Gironde, l’autre dans la métropole. À condition d’avoir le nombre de doses suffisant.