Sud-Ouest du 12 septembre 2020
Sud-Ouest du 12 septembre 2020
Castex prêche la vigilance
COVID-19 Le Premier ministre a annoncé, hier, une réforme de la politique de dépistage. Il a mis l’accent sur les solutions locales et a repoussé le spectre du reconfinement généralisé
Des tentes de dépistage dédiées aux cas prioritaires vont éclore là où c’est nécessaire. Dans le centre-ville de Bordeaux, elles ont été prises d’assaut cette semaine. PHOTO FABIEN COTTEREAU/« SUD OUEST »
Soigneusement isolé depuis sa journée passée aux côtés de Christian Prudhomme, le directeur du Tour de France positif au coronavirus, Jean Castex a effectué hier son retour au micro sur ce souci qui le concerne au premier chef : la progression à grande vitesse du Covid-19.
Il est peu de dire que ses mesures, concoctées au fil d’un Conseil de défense réuni en fin de matinée, étaient attendues. Les médecins généralistes sont exaspérés par les entorses au parcours de soins, les laboratoires d’analyses médicales sont débordés, les malades ont parfois bien du mal à se faire tester dans la « fenêtre » de contagion (surtout les cinq jours qui suivent les premiers symptômes) et les résultats sont trop longs à leur parvenir.
Les ratés ne cessent d’enfler sur ce sujet crucial. En théorie, les personnes qui présentent des symptômes, les « cas contacts » et les résidents des Ehpad, sont prioritaires pour subir l’épreuve du test PCR – par prélèvement dans les fosses nasales. Dans les faits, ce principe est battu en brèche. Or la fluidité du dépistage conditionne la maîtrise des chaînes de transmission du Covid-19 et, in fine, de l’épidémie.
Les temps d’attente trop longs
Les spécialistes ont soupçonné le problème dès l’annonce par Emmanuel Macron, le 14 juillet, du libre accès aux tests sans prescription médicale. L’inflation du nombre de cas le rend chaque jour plus aigu. Le Premier ministre en a convenu. «Nous réalisons plus d’un million de tests par semaine, ce qui fait de la France le troisième pays qui teste le plus en Europe. Mais les temps d’attente sont trop importants, nous en avons parfaitement conscience », a-t-il déclaré.
Le système va donc être réformé. Les laboratoires d’analyses médicales devront réserver des créneaux horaires aux cas prioritaires et des tentes de dépistage qui leur seront dédiées vont éclore là où c’est nécessaire.
La décision aux préfets
Le traçage des cas sera, lui aussi, musclé. Une nécessité si l’on considère que certains « cas contacts » passent sous les radars des Agences régionales de santé et de l’Assurance-maladie. Jean Castex a annoncé 2000 recrutements supplémentaires pour doper leur force de frappe. La «quatorzaine», cette période de réclusion pour éviter de contaminer l’entourage, va en revanche être réduite à sept jours.
Le Premier ministre, qui n’aime rien tant que souligner son attachement aux territoires, a ensuite annoncé qu’il ne dévierait pas de son credo : quelle que soit la situation épidémique globale, les solutions locales doivent prévaloir. « Les mesures ne doivent pas s’appliquer partout de la même manière », a-til insisté.
Si 42 départements sont désormais parés de la couleur rouge qui affuble la Gironde et maintenant les Pyrénées-Atlantiques, ce n’est pas pour faire joli. Le classement en « vulnérabilité élevée » confère au préfet du département le pouvoir « de déclencher des mesures supplémentaires » en concertation avec les élus. Par exemple, la généralisation du port du masque, la restriction des rassemblements et des horaires d’ouverture des commerces.
C’est la logique qui a prévalu le 25 août, quand le préfet des Bouches-du-Rhône a imposé la fermeture des bars et des restaurants à 23 heures. Depuis, les établissements ont gagné une heure et demie de répit, jusqu’à 0h30, mais le port du masque a été généralisé à toutes les zones urbaines du département.
Cette territorialisation des remèdes est à l’opposé de l’approche Macron/Philippe qui prévalait au printemps. La Nouvelle-Aquitaine, qu’on avait peine à considérer en situation épidémique à l’époque, avait dû sagement attendre son déconfinement le 11mai, comme tout le monde.
Pas de reconfinement général
Jean Castex en a profité pour repousser une fois de plus le spectre d’un reconfinement pour tous, une hypothèse qui réduirait à néant l’équilibre sur lequel le gouvernement compte s’appuyer: «lutter» d’un côté et démontrer « notre capacité à vivre normalement» de l’autre. Mais le Premier ministre a aussi insisté sur la gravité de l’instant. Les décisions prises procèdent de la hausse sensible du nombre d’hospitalisations, une première depuis de longues semaines.
Ce moment signe le terme d’une période d’insouciance, quand le SARS-CoV-2 circulait à vitesse accélérée dans les cénacles des plus jeunes en épargnant leurs aînés. Le virus «finit inévitablement par toucher les personnes les plus vulnérables », a regretté le Premier ministre. Sur ce point, les prochaines semaines devraient être chiches en bonnes nouvelles...